Tout à l’arrêt
Dans le chant fédéral en honneur de la fédération allemande des travailleurs, le poète et révolutionnaire Georg Herwegh écrivait depuis son exil en Suisse ces paroles légendaires: «Toutes les roues s’arrêtent de tourner si ton bras fort le désire.» Ce n’est pas un quelconque bras fort qui fait que les roues s’arrêtent de tourner un peu partout dans le monde. Un virus de la taille située entre 80 et 160 milliardièmes de mètre met la vie économique et sociale à l’arrêt dans de nombreux pays. Le système sanitaire menace d’être débordé même dans des pays hautement développés. Les manifestations sportives et culturelles ne se déroulent plus à la télévision qu’en mode Replay. Des commissions de crise sont en permanence à l’œuvre. Le droit d’urgence est en vigueur. Des aides financières de l’Etat se chiffrant par milliards sont censées amortir la détresse des entreprises et des employés et au pire des cas empêcher la banqueroute de secteurs entiers.
Les conséquences de cette situation de crise touchent les gens de façon très différente. Tandis que la vente par correspondance est en plein boom, beaucoup de restaurants, de salons de coiffure, d’organisateurs de spectacles et de marchands forains ne survivront économiquement que si les pouvoirs publics leur accordent des aides substantielles. Dans nombre de métiers, le télétravail n’est pas possible. Les indemnités de chômage partiel ne remplacent pas le plein salaire. A cause de budgets familiaux déjà suffisamment limités et d’absence d’épargne, l’argent ne suffit de toute façon pas à certains pour subvenir à leurs besoins de première nécessité. L’immense engagement créatif du corps enseignant pour rendre possible l’apprentissage à domicile n’empêchera pas que les écoles fermées feront durement ressentir les inégalités de chance en matière de formation. Par ailleurs, ne peut rester à la maison que celle ou celui qui en a une.
Nous autres Amis de la Nature sommes également touchés de plein fouet par la situation actuelle. Les activités préparées avec beaucoup de soin et de cœur tombent à l’eau. Les réunions et manifestations sont annulées. Par manque de demande et en raison des restrictions imposées par les autorités, les maisons des Amis de la Nature sont fermées, avec de graves conséquences financières à la clé. Piliers du mouvement AN, les principes de vivre ensemble la nature et de favoriser les rencontres et l’activité physique ne sont plus applicables jusqu’à nouvel ordre.
Malgré la situation exceptionnelle, nos équipements sanitaires fonctionnent. L’approvisionnement en biens de première nécessité est à tout instant garanti pour tout le monde. Les prestations de l’infrastructure restent à notre disposition. A ces constats positifs s’ajoutent des valeurs dont on peut espérer qu’elles perdureront même à la fin de la crise actuelle:
- Grâce à l’action résolue et prudente des autorités, la confiance en nos institutions politiques a été renforcée. Se mettre à disposition pour accomplir des tâches dans l’intérêt public et recourir au droit de participation politique devraient devenir à l’avenir de plus en plus monnaie courante.
- L’élan de solidarité actuellement ressenti contribue de manière déterminante à endiguer la crise et ses conséquences économiques, à assurer la survie d’un maximum d’individus et à raffermir la cohésion sociale. Ces défis resteront toujours d’actualité après la fin de l’état d’exception et l’action solidaire sera plus nécessaire que jamais.
Urs Wüthrich-Pelloli
Président des Amis de la Nature Suisse